Se promener à travers le temple d’Angkor Wat sans aller au Cambodge est désormais à portée de clic: Google l’a numérisé dans le cadre de son projet d’hébergement des «trésors culturels du monde», qui ne menace pas le tourisme classique selon lui.
Présenté en 2014 à Angkor Wat même, ce dernier projet de Google permet aux internautes de visiter le complexe du 12e siècle, merveille de l’architecture khmère, dans le nord du Cambodge, depuis chez soi.
Plus d’un million de photographies ont été assemblées, afin de créer 90 000 vues à 360° de ce complexe aux plus de cent temples.
Ce nouveau projet s’inscrit dans une entreprise plus vastes du groupe américain de devenir le géant du patrimoine mondial, avec plusieurs centaines d’institutions désormais partenaires de sa plateforme en ligne Google Art Project, dont de nombreux musées français.
«Récemment, nous avons fait le Taj Mahal, le Grand Canyon, le Mont Fuji» au Japon, explique à l’AFP Manik Gupta, directeur de projet pour Google Maps.
«Mais l’ampleur de ce que nous avons à Angkor Wat est sans précédent», ajoute-t-il, disant la « sensation incroyable » de pouvoir explorer chaque recoin d’Angkor, grâce à la finesse du maillage sans précédent des photographies collectées.
Alliant le geste à la parole, Gupta revêt une des dernières innovations de Google, baptisée « trekker » (« randonneur »).
Quinze caméras attachées à un sac à dos contiennent des disques durs et une batterie. Chaque caméra prend des photos de haute définition toutes les deux secondes et demi.
Voitures, trains puis randonneurs
En marchant à travers les ruines d’Angkor, les «randonneurs» de Google permettent de prendre en photo des zones inaccessibles aux traditionnelles «voitures Google» cartographiant à l’aide de caméras les rues du monde entier.
Pour ce nouveau projet, cinq Cambodgiens ont été chargés de randonner à travers les temples, jusqu’à huit heures par jour, pour enregistrer chaque recoin.
«Google Street View a été lancé en 2007. Et depuis, nous avons accumulé une expérience immense. Nous avons même utilisé des motoneiges et des trains. Le randonneur est notre dernier outil», explique Manik Gupta.
Depuis, cette expérience a été mis par Google au profit de la numérisation dans le domaine de l’art et de la culture.
«S’il y a un pays où c’était bien nécessaire, c’est le Cambodge», explique Amit Sood, directeur de l’Institut culturel de Google, évoquant la destruction de nombreuses oeuvres d’art sous le régime des Khmers rouges dans les années 1970.
Au total, 4,2 millions de touristes ont visité le Cambodge en 2013, en hausse de 17% par rapport à 2012, et la plupart se sont rendus à Angkor War.
Amit Sood balaye les craintes de ceux qui pensent que la numérisation risque de modifier en profondeur la façon de découvrir le monde: en restant confortablement dans son salon ou son bureau.
«Tous les musées que nous avons numérisés connaissent une hausse (de fréquentation) sans précédent», assure-t-il à l’AFP, ne voyant dans son travail «aucun effet négatif».
Reste que la magie du premier regard sur un lieu inconnu risque d’être altérée, maintiennent certains.
«Si je voulais venir ici, je ne regarderais pas d’abord sur internet. J’estime que c’est plus chouette de le voir d’abord en vrai, et peut-être de le revoir ensuite sur internet», Kiesbeth Gerritsen, touriste néerlandaise à Angkor Wat.
«Je ne peux pas imaginer que le fait de voir des images sur internet ou même une vue à 360° comme dans le projet de Google Maps puisse se substituer à ce qui se passe ici», ajoute Tom Sturrock, écrivain voyageur.
«L’expérience online ne va jamais remplacer ce que cela fait d’être ici, quand le soleil se lève sur Angkor Wat», dit-il.
Les internautes du monde entier peuvent désormais découvrir Angkor Wat dans toute sa magnificence. Mais au Cambodge, peu auront cette chance – moins d’un habitant sur trois a accès à internet.