Appréciation du risque
Tassement de la croissance favorisé par une conjoncture externe défavorable
En 2016, la croissance uruguayenne devrait rester modeste, affectée par les performances médiocres de ses deux principaux partenaires économiques, le Brésil et l’Argentine. Le commerce extérieur devrait encore pâtir de la baisse de la demande des pays voisins et de la Chine qui absorbe près du quart des exportations du pays, ainsi que du prix relativement faible des matières premières (soja en particulier). Malgré la dépréciation de la monnaie locale, les exportations manufacturières et agricoles ne devraient pas gagner en compétitivité puisque les monnaies de la région subissent le même sort. La demande externe stagnante devrait d’ailleurs contribuer à la baisse de la confiance des entreprises et participer au ralentissement de l’investissement privé dans l’industrie manufacturière. Compte tenu d’une conjoncture qui s’annonce plutôt défavorable à court terme, le Congrès a exceptionnellement accepté d’augmenter le budget des dépenses dédiées aux programmes sociaux et aux infrastructures, ce qui devrait soutenir l’investissement public. La consommation des ménages devrait aussi garder un certain dynamisme dû à l’indexation des salaires sur les prix alimentaires. L’inflation devrait rester au-dessus de la fourchette cible (3%-7%) fixée par la banque centrale, favorisée par l’indexation des salaires et la dépréciation de la monnaie.
Un programme de consolidation budgétaire reporté à 2017
Le ralentissement de l’économie uruguayenne devrait compromettre le programme de consolidation budgétaire annoncé par le président Tabaré Vazquez dès son arrivée au pouvoir en mars 2015. Le gouvernement misait en effet sur une politique budgétaire plus restrictive afin de limiter la hausse de l’endettement public qui n’a cessé de progresser ces quatre dernières années et dont le poids devrait encore s’alourdir en 2016. Bien que le budget 2015-2016 prévoit une réduction progressive du déficit public tout en préservant les dépenses sociales (en éducation en particulier), la hausse exceptionnelle des dépenses publiques approuvée par le Congrès en octobre 2015 devrait repousser le processus de consolidation budgétaire à 2017. L’objectif des autorités locales est d’afficher un excédent primaire de 1% du PIB d’ici la fin du mandat présidentiel en 2019 (contre un déficit de 0,6% en 2014). Le gouvernement table notamment sur la hausse des recettes fiscales liée au dynamisme de la consommation des ménages, plutôt que sur la création de nouvelles taxes et impôts. Le budget suppose également une augmentation des recettes des exportations liée à la reprise attendue des économies de pays voisins d’ici 2017 ainsi qu’à la hausse de la contribution des entreprises publiques au budget de l’Etat.
Un déficit courant pénalisé par la baisse des échanges commerciaux
Le commerce externe devrait encore être pénalisé par la baisse des échanges commerciaux en volume et en valeur. La faiblesse des prix des produits agricoles bruts ou peu transformés (soja, viande et produits laitiers) ainsi que la baisse de la demande des principaux partenaires commerciaux (Chine, Brésil et Argentine) contribuent aux mauvaises performances des exportations du pays. Les exportations de marchandises manufacturées traditionnelles (vêtements, produits chimiques, matériaux de construction) devraient aussi être pénalisées par la baisse de la demande. Les importations devraient encore bénéficier du niveau relativement bas du prix de l’énergie, du pétrole en particulier qui représente près de 20% des importations. La balance des services devrait encore être pénalisée par la diminution du nombre de touristes argentins (près de 60% des visiteurs) et celle des revenus, par le niveau élevé des rapatriements de bénéfices et des intérêts payés de la dette. Malgré le ralentissement des investissements brésiliens et argentins, l’Uruguay reste l’un des placements privilégiés pour les IDE en Amérique du Sud, grâce notamment à la bonne gouvernance et à la stabilité politique du pays. Les réserves de change restent élevées (13,5 mois d’importations) et contribuent à la résilience du pays face aux chocs externes.
Stabilité politique malgré quelques divisions au sein de la gauche au pouvoir
Le président Tabaré Vázquez et son parti de centre-gauche disposent de la majorité dans les deux chambres du Congrès. Son gouvernement en place depuis mars 2015 poursuit les politiques macroéconomiques orthodoxes de son prédécesseur, José Mujica, tout en portant une attention particulière aux thèmes de l’éducation, de l’infrastructure et de la sécurité. La coalition au pouvoir semble cependant divisée entre ceux qui soutiennent le maintien des dépenses sociales élevées et ceux qui prônent l’application d’une politique budgétaire plus restrictive dans un contexte de ralentissement de l’activité. Sur le plan de la politique extérieure, le président Vázquez milite auprès du Brésil et de l’Argentine pour que les négociations dans le cadre de l’accord de libre-échange entre le Mercosur et l’Union Européenne (datant de 1995) puissent se concrétiser. Les tensions avec le Venezuela après que le président uruguayen ait exprimé des inquiétudes au sujet de la protection des droits de l’homme dans ce pays risquent d’être ravivées suite à la victoire du président Mauricio Macri en Argentine, un farouche opposant à la politique du gouvernement vénézuélien.
Source : COFACE