Appréciation du risque
L’économie fait preuve de résistance malgré la chute des cours du pétrole
La croissance a progressé à un rythme rapide en 2015 portée par le regain de la production pétrolière, l’entrée en production de deux nouvelles cimenteries et la poursuite des grands projets structurants (phase 2 du port en eau profonde de Kribi, construction de trois barrages et du deuxième pont sur le Wouri). L’impact positif des investissements déjà réalisés, de nouveaux investissements publics et de solides performances du secteur des services devraient continuer à porter la croissance en 2016 même si la production d’or noir se stabilise.
Le secteur primaire joue toujours un rôle important et tire des recettes non négligeables de son agriculture d’exportation (bois, cacao, banane, coton…). Grâce à la découverte de nouveaux gisements et à la mise en œuvre de nouvelles technologies de forage, la production pétrolière s’est redressée, pour au moins quelques années. Cependant, l’environnement des affaires reste difficile, ce qui freine le développement du secteur privé. En outre, l’économie demeure fortement dépendante des aléas climatiques et de l’évolution des cours mondiaux des produits de base, et la croissance peu inclusive.
Après avoir connu un rebond en 2015, en raison de l’effet retard, sur le prix des transports et de l’alimentation, du relèvement des prix du carburant à la pompe en 2014, l’inflation devrait légèrement diminuer en 2016. Cela résulterait de la dissipation de ces hausses de prix, de l’ancrage du franc CFA à l’euro, du faible niveau des cours mondiaux des produits de base et de la politique de contrôle des prix pratiquée par les autorités.
Les déficits des comptes publics et extérieurs se creusent, le risque de surendettement redevient élevé
Les résultats budgétaires se sont détériorés. Les recettes ont été affectées par la chute des cours du pétrole (la part des recettes pétrolières dans les revenus de l’Etat a été ramenée à 14%), même si cette baisse a été en partie compensée par une diminution des subventions aux prix des carburants. Surtout, les dépenses d’équipement ont fortement augmenté, en lien avec la mise en œuvre des grands projets d’infrastructure et la lutte contre le groupe terroriste Boko Haram dans l’Extrême-Nord du pays. L’effort de revitalisation de cette région devrait entraîner un important creusement du déficit budgétaire en 2016.
La baisse du prix du baril et la hausse des importations liée à la mise en œuvre des grands projets d’investissement sont également à l’origine de la dégradation des comptes extérieurs. La part des exportations pétrolières dans le total des ventes à l’étranger est passée de 45% à 39% entre 2013 et 2015, ces dernières devant toutefois se stabiliser en 2016. Les ventes d’autres produits de base, comme celles de bois, de cacao, d’aluminium et de coton, devraient bénéficier de la hausse modeste de leur production. La balance commerciale et celle des services devraient demeurer déficitaires. Il devrait en être de même pour celle des revenus, du fait des rapatriements de bénéfices des firmes étrangères. En revanche, la balance des transferts courants devrait continuer d’afficher un léger excédent grâce à la bonne tenue des remises des travailleurs expatriés.
Le pays avait bénéficié d’un important allègement de dette en 2006 suite à l’atteinte du point d’achèvement de l’initiative PPTE. En quelques années, il s’est cependant rapidement ré-endetté. Le rythme élevé de progression de l’endettement extérieur à des conditions de plus en plus onéreuses (notamment auprès de la Chine), conjugué à la faiblesse des exportations pétrolières, risque de menacer la viabilité de la dette à long terme. En outre, la faiblesse de la performance financière des entreprises publiques pourrait engendrer des risques de dette latente pour l’Etat.
L’insécurité persiste dans l’Extrême-Nord du pays et des incertitudes entourent toujours la succession du chef de l’Etat
Le Cameroun doit faire face à une situation sécuritaire tendue depuis 2013 du fait des incursions de la secte islamiste nigériane Boko Haram dans l’Extrême-Nord de son territoire. Les capacités militaires de la secte ont été réduites sous l’action conjuguée des armées du Nigéria, du Cameroun, du Tchad et du Niger, ce qui ne l’empêche cependant pas de mener, depuis juillet 2015, une campagne d’attentats-suicides dans cette partie du pays.
A cela s’ajoute les incertitudes entourant la succession du président Paul Biya, au pouvoir depuis 1982 et dont le sixième mandat court jusqu’en 2018. Le chef de l’Etat a su maintenir, jusqu’ici, un certain équilibre entre les différentes ethnies et communautés linguistiques. Son départ ou sa disparition pourrait déclencher des luttes au sein du parti au pouvoir et remettre en cause ce fragile équilibre. Le parti présidentiel devrait malgré tout parvenir à se maintenir au pouvoir, faute d’opposition crédible.