Appréciation du risque & protection
Enlisement du conflit
La situation syrienne semble inextricable à l’heure actuelle et elle cristallise les enjeux aussi bien locaux, régionaux et internationaux. A la confrontation entre le régime et les rebelles syriens en 2010 se sont ajoutés un nombre important d’acteurs et une multiplication des lignes de front. L’opposition syrienne reste divisée malgré des tentatives de réunification comme ce fut le cas lors de la conférence de Riad du 9 décembre 2015. Alors qu’une partie de l’armée syrienne libre s’est radicalisée s’alliant à des groupes islamistes tel que Ahrar al-Sham ou djihadistes tel que le groupe Al Nosra filiale d’Al-Qaïda, elle doit faire face simultanément aux forces du régime Assad et aux renforcements des positions de l’Etat islamique en Syrie. Plusieurs acteurs régionaux et internationaux sont également impliqués dans le conflit. La Russie et l’Iran continuent d’apporter leur soutien au régime de Bachar El Assad et ce aussi bien militairement que par un appui au sein du conseil de sécurité de l’ONU. La coalition internationale formée par la France, les Etats Unis, la Turquie et un nombre de pays arabes qui bombardaient les positons de l’Etat islamique en Irak a également décidé d’étendre ses frappes à la Syrie. La principale divergence au sein de la communauté internationale émerge autour de la survivance du régime Assad. Alors que beaucoup voyaient la fin du régime Assad comme la solution à la crise syrienne, le remplacement du clan Assad à la tête de la Syrie pourrait être remis en question face à la progression de l’Etat Islamique.
La crise syrienne réveille également les tensions régionales à l’image de la dégradation des relations entre la Russie et la Turquie suite à la frappe d’un avion russe par l’armée turque ou du contentieux de souveraineté entre l’Irak et la Turquie autour de la présence de l’armée turque en Irak.
Effondrement du tissu économique
A l’heure ou la guerre en Syrie continue de s’enliser et qu’aucune issue politique ne semble se profiler, l’érosion du tissu économique syrien perdure. Il est difficile en raison du manque de données d’évaluer l’impact économique du conflit. En effet, le pays reste morcelé entre différentes zones d’influence et la persistance des combats continue d’engendrer des destructions d’infrastructures et des déplacements de populations. D’après une estimation de la Banque mondiale, le PIB syrien s’est contracté de plus de 15,4 % par an en moyenne entre 2011 et 2014 et ce recul pourrait atteindre 16 % en 2016. La diminution du PIB est principalement imputable à la baisse de la production pétrolière. En 2010, la Syrie produisait l’équivalent de 360 000 barils par jour contre 45 000 en 2015. En outre, la poursuite des affrontements et la multiplication des bombardements ont considérablement endommagé les infrastructures aussi bien publiques que privées, annihilant un nombre important de secteurs tels que le transport, la construction et le commerce. Dans un rapport de juillet 2015, la Banque mondiale fait état des dommages totaux recensés sur les principales villes du pays (Alep, Homs, Lattaquié et Idlib) et évalue le coût des destructions à 4 milliards de dollars. On note qu’Alep qui est un des bastions de la rébellion est la ville la plus touchée et Lattaquié sous contrôle du régime, la ville la plus épargnée. Le nombre de personnes déplacées au sein et en dehors des frontières syriennes est également préoccupant. En 2014, les Nations Unies dénombrent 7,6 millions de déplacés au sein de la Syrie et plus récemment, en septembre 2015, le Haut-commissariat aux réfugiés comptabilise plus 4 millions de réfugiés syriens en dehors des frontières dont une majorité se trouve dans les pays limitrophes (Liban, Jordanie, Turquie et Irak). La situation humanitaire est également critique aussi bien dans les zones d’affrontements que dans les zones contrôlées par les rebelles ou par le régime. Le nombre de personnes ayant besoin d’une assistance humanitaire est évalué à 12 millions. Les civils sont confrontés à des pénuries d’eaux, des coupures d’électricité et à une dégradation de la situation sanitaire en particulier dans les villes assiégées. Les problèmes d’approvisionnement liés aux difficultés d’acheminement des marchandises ont entrainé une augmentation exponentielle de l’inflation. Estimée à 90 % en 2013 par la Banque mondiale, elle serait de 14 % en 2014 et de 30 % en 2015. L’inflation est d’autant plus élevée qu’elle est accompagnée par une forte dépréciation de la livre syrienne
Creusement des déficits jumeaux
Les finances publiques du régime de Bachar El Assad n’ont cessé de se dégrader depuis l’intensification du conflit. Le déficit public aurait atteint 14 % de 2011 à 2014 et devrait atteindre 22 % en 2015. La baisse des recettes pétrolières et des prélèvements obligatoires a entrainé une contraction des recettes publiques qui représenteraient moins de 6 % du PIB en 2015. Par ailleurs, les dépenses publiques ont cru significativement sous le poids de l’augmentation des dépenses militaires. La désertion des services publics dans les zones d’affrontement et le repli dans les zones contrôlées par le régime ont engendré une résorption des dépenses courantes sans que cela ne freine la fuite en avant des dépenses publiques.
Le solde de balance courante présenterait également un déficit conséquent. Les recettes pétrolières s’effriteraient passant de 4,7 milliards en 2011 à 0,14 milliard en 2015. Les réserves de changes s’épuiseraient depuis 2010 passant de 20 milliards à moins d’un milliard de dollars fin 2015. Le taux de change poursuivrait sa trajectoire baissière passant de 47 livres pour un dollar en 2010 à 305 livres pour 1 dollar en 2015, laissant ainsi le champ à un important marché noir de devises.
Source : COFACE