Appréciation du risque
Un dynamisme qui s’essouffle en 2016
Après un regain de croissance enregistré en 2015, l’activité devrait ralentir modérément en 2016. Les effets positifs découlant de la prise de fonction du président Sissi ont commencé à s’estomper en 2015 en dépit des signaux positifs forts lancés par les autorités. En 2016, L’Égypte devrait faire face à de multiples chocs tout en étant rattrapée par les fragilités structurelles de son économie. La faiblesse des cours du Brent continuerait de pénaliser le secteur pétrolier qui représente 13 % des exportations égyptiennes. La reprise du tourisme qui constituait l’un des relais de croissance en 2015 serait compromise. L’attentat visant l’avion civil russe dans le Sinaï devrait en effet limiter les arrivées de touristes en provenance de Russie et d’Europe de l’est dont la part représentait 30 % des arrivées en 2015. La tendance baissière observée dans le secteur manufacturier se poursuivrait. Les raisons expliquant le relâchement de la production manufacturière devrait continuer à opérer en 2016. Bien qu’en diminution en 2016, l’inflation qui entrainait une augmentation des coûts de production devrait rester forte. De même, la rémanence des problèmes d’approvisionnement en intrants, de coupures d’électricité et de manque de devises étrangères continueraient de plomber les perspectives du secteur. La reprise des investissements publics à travers le projet d’agrandissement du Canal de Suez a permis de compenser le ralentissement de l’activité dans le secteur privé. En 2016, les autorités égyptiennes devraient continuer de soutenir la croissance en multipliant les partenariats publics-privé facilités par la réforme du code de l’investissement opérée en avril 2015. Un total de douze projets ont été recensés et devraient être implémentés en 2016 dans différents secteurs (électricité, désalinisation, mines). A moyen terme, les retombées de la conférence de Sharm El Sheik sur l’investissement et la mise en exploitation du champ gazier découvert par ENI devraient contribuer à une augmentation de la croissance potentielle.
Une consolidation des dépenses publiques
La consolidation des finances publiques initiée par le président Sissi s’est traduite par une réduction du déficit public en 2015 dans un contexte de baisse des dons accordés à l’Egypte. L’introduction du système de carte intelligente à destination des populations les plus défavorisées a entrainé une réduction du poids des subventions dans les dépenses publiques. De même, la stagnation des salaires des fonctionnaires a limité la progression des dépenses courantes. Afin d’assurer un soutien à l’activité en 2016, les dépenses aussi bien courantes que d’investissement devraient progresser. L’entrée en vigueur des programmes sociaux visant l’éducation et la santé présentée dans le cadre de la stratégie quinquennale de développement 2014/2019 devait être lancée en 2016. Les autorités entendent financer cet accroissement des dépenses par une augmentation des prélèvements obligatoires associés à l’élargissement de l’assiette fiscale. Une réforme complétant la mise en place de la TVA devrait être ratifiée par le nouveau parlement en 2016. L’élargissement du canal de Suez permettant d’accroitre le nombre de passages sur le canal devrait en outre favoriser un accroissement des redevances bien que le ralentissement du commerce mondial devrait en limiter la progression.
Bien que la dette reste élevée en niveau, la réduction du déficit public depuis 2014 a conduit à un fléchissement de la trajectoire de celle-ci. Le retour à une stabilité politique et les signaux positifs lancés par les autorités aux marchés financiers ont facilité le recours à l’endettement extérieur avec le lancement en avril 2015 d’une émission obligataire en euros de 1,5 milliards de dollars.
Des comptes extérieurs qui restent déficitaires
Le compte courant devrait rester déficitaire en 2016 en raison d’une contraction des exportations et d’une baisse des recettes touristiques. Les exportations de pétrole qui occupaient le premier poste d’exportations en 2014 ont baissé de près de 30 % sur l’année fiscale 2014/2015 aggravant ainsi le déficit de la balance commerciale. Les importations devraient continuer de progresser bien qu’on observe une décélération des importations en biens d’équipement faisant écho au ralentissement du secteur manufacturier. Par ailleurs, le pays fait face à une diminution des réserves de change dont le niveau était inférieur à trois mois d’importations en novembre 2015. Cette baisse des réserves a conduit la banque centrale à imposer un contrôle de change strict. Les diverses réglementations allant dans ce sens continuent de pénaliser l’activité des entreprises en générant des problèmes de transfert. La dévaluation en novembre 2015 de la livre de 7.83/$ à 8.03/$ laisse cependant présager d’un assouplissement de la politique de change suite à la nomination de Tarek Amer au poste de gouverneur de la banque centrale.
Des élections législatives consensuelles
Faisant suite à l’avènement du président Sissi en mai 2014, l’Égypte sans parlement depuis juin 2012 a tenu ses premières élections législatives en novembre 2015. Marquée par un faible taux de participation (28 %), elles ont été remportées par la majorité « Pour l’amour de l’Egypte » proche du président et ont obtenu les 120 sièges à pourvoir selon un mode de scrutin de liste sur 528. Le président doit par ailleurs choisir 28 députés, le reste étant élu selon un mode de scrutin uninominal.
En dépit d’un climat général plus apaisé, la période à venir s’annonce délicate pour le pays. L’Égypte qui axe sa politique étrangère sur la lutte contre le terrorisme doit faire face à la menace croissance des djihadistes sur son propre territoire dans le Sinaï notamment où l’État islamique a revendiqué l’attentat sur l’avion civil russe mais également à la frontière libyenne où les mouvements djihadistes se renforcent face au vide politique que connait la Lybie.