Appréciation du risque
Croissance stable qui repose principalement sur les investissements
La croissance devrait se stabiliser en 2016, soutenue par les projets d’infrastructure, en particulier la construction, lancée fin 2015, du port de Bagamoyo. Les investissements dans le secteur extractif, liés au projet d’exploitation des réserves gazières découvertes en 2010, pourraient néanmoins être ralentis par les incertitudes concernant l’évolution du cadre juridique applicable au secteur minier, après l’arrivée du nouveau gouvernement en novembre 2015. En outre, la chute des cours du pétrole observée en 2015 et l’absence de rebond prévu pour 2016 pourrait conduire les compagnies étrangères à reporter leurs décisions d’investissement. Les services (commerce, télécommunications, intermédiation financière) devraient rester dynamiques. En revanche les performances du secteur agricole sont plus incertaines compte tenu des conséquences attendues de la sécheresse sur les récoltes.
La demande des ménages devrait être soutenue par l’augmentation des dépenses sociales annoncée par le nouveau président, même si la hausse des prix pourrait en limiter la progression.
Le niveau bas des cours des principaux produits d’exportation (or, coton, café, noix de cajou), conjugué à une production peu soutenue de ces mêmes produits, ne devrait pas permettre aux exportations de contribuer positivement à la croissance.
L’inflation devrait être accentuée par l’augmentation des prix des biens alimentaires qui pèsent pour près de la moitié dans l’indice des prix. Par ailleurs, la dépréciation du shilling face au dollar pourrait renchérir le coût des importations.
Des déficits budgétaire et courant persistants
Le déficit budgétaire devrait légèrement se creuser en 2016. L’année fiscale couvrant la période juillet 2015 à juin 2016, les mesures annoncées par le nouveau gouvernement fin 2015, visant notamment à augmenter les revenus, ne pourront pas être mises en œuvre avant le second semestre 2016. La lutte contre l’évasion fiscale et la réduction des exonérations n’auront en tout état de cause pas d’effet immédiat. Les dépenses courantes resteront élevées, compte tenu des promesses faites par le président, en particulier concernant l’éducation (gratuité pour le secondaire), la santé et les infrastructures (énergie, transport, agriculture) qui figuraient déjà parmi les priorités affichées par son prédécesseur. La baisse des dons (de 2,6 % du PIB en 2013 à 1,6 % en 2015), consécutive notamment au gel des flux de certains donneurs suite à une affaire de corruption dans le secteur énergétique, pourrait également peser sur les finances publiques
L’endettement de l’Etat augmente régulièrement, en raison des besoins de financement liés aux projets d’infrastructure, mais la prépondérance des prêts concessionnels réduit le risque de défaut.
Le déficit courant du pays est structurellement élevé, le pays important deux fois plus qu’il n’exporte. Les recettes d’exportation des secteurs aurifère (30 % du total) et agricole ne devraient pas augmenter en 2016, en l’absence de rebond des prix et de la production. Parallèlement, la demande des ménages et les importants besoins d’équipements, surtout pour le développement du secteur gazier, devraient accroître les importations. Le prix bas du pétrole (30 % à 40 % des importations) ainsi que des flux provenant du tourisme, pourraient éviter une trop forte dégradation du solde.
Le shilling, qui avait perdu 25 % de sa valeur face au dollar entre janvier et fin juin 2015, s’est stabilisé par la suite. Les pressions à la baisse devraient persister en 2016 compte tenu du déficit courant et de la hausse des taux d’intérêt américain, mais vraisemblablement moins fortement qu’en 2015.
D’importants défis à relever pour le nouveau gouvernement et des performances en matière de gouvernance en recul
Les élections d’octobre 2015 ont confirmé la prédominance du parti, Chama Cha Mapinduzi (CCM), qui a remporté 185 des 215 sièges au parlement, à l’issue d’un scrutin qui s’est déroulé dans le calme mais dont les résultats ont été contestés par l’opposition. Le vote a d’ailleurs été annulé sur l’île de Zanzibar, en raison des accusations de fraudes. John Magufuli, qui a succédé à J. Kikwete qui ne pouvait briguer un troisième mandat, doit désormais mener à terme la révision Constitutionnelle, source de tensions dans le pays, en particulier concernant un éventuel changement de statut de Zanzibar. Le score historique (40 %) du Chadema, principal parti d’opposition, témoigne d’une baisse de popularité du CCM à l’égard duquel les attentes sont fortes. Leur déception pourrait être source de tensions sociales.
Le classement de la Tanzanie selon les indicateurs de gouvernance de la Banque Mondiale est globalement comparable à celui de ses pays voisins d’Afrique de l’est. Mais les performances du pays se dégradent en matière de stabilité politique (151ème sur 2015 en 2014 contre 115ème en 2011) et surtout de lutte contre la corruption (162ème contre 150ème).