Appréciation du risque & protection
Une économie annihilée par la guerre civile
Depuis 2014, l’économie yéménite s’est installée dans une profonde récession s’aggravant à mesure que le conflit perdure. La production domestique de pétrole s’est effondrée en raison des affrontements et du sabotage des infrastructures. Les perspectives du secteur agricole (19 % du PIB en 2013) demeurent incertaines compte tenu de l’aggravation des pénuries d’eau souterraine et de la destruction des champs par les bombardements de la coalition. Le repli de l’investissement et la destruction des infrastructures laissent à penser que même en cas d’apaisement du conflit un retour au niveau de croissance précédent la guerre civile serait difficile à court terme. Le blocus sur les importations imposé en mai dernier par la coalition menée par l’Arabie Saoudite engendre des difficultés d’approvisionnement qui combinées à une forte inflation devrait aggraver la crise humanitaire qui touche le pays. Les Nations Unis estiment que 80 % de la population yéménite devrait avoir besoin d’une assistance humanitaire d’urgence. Le nombre de Yéménites en situation d’insécurité alimentaire a augmenté de 33 % depuis le mois de mars 2015, passant de 16 à 21 millions en juillet 2015 et la dégradation de la situation sanitaire a entrainé des épidémies de maladies telles que la dengue et le paludisme, notamment dans la ville d’Aden.
Un état des comptes extérieurs et publics conditionné à l’évolution du conflit
Le blocus imposé aux importations de marchandise et la baisse des exportations notamment en hydrocarbures ont entrainé un creusement significatif du déficit courant en 2015 qui devrait perdurer en 2016 si la situation restée inchangée.
La situation des comptes publics est également critique. Les aides internationales bilatérales notamment celle de l’Arabie Saoudite deviennent les principales sources de financement de l’Etat dans les zone contrôlé par le régime. Au sein des zones d’affrontements, les associations humanitaires se substituent aux services publics apportant aide alimentaire et aide médicale à la population. Face à la vacance de toutes institutions représentatives, le FMI a suspendu le prêt de 550 millions de dollars sur trois ans accordé au titre d’une Facilité élargie de crédit.
Une situation politique et sécuritaire critique
Alors que le pays souffre depuis l’union du Yémen en 1990, d’une fracture entre les communautés du Nord et du Sud, le gouvernement de transition de l’ex vice-président Abdel-Rabbuh Hadi avait pour mission d’accompagner la transition politique en élaborant une nouvelle constitution qui prévoyait notamment la reconfiguration du pays en Etat fédéral composé de six régions.
Ces mesures ont relancé les revendications des tribus zaydites d’obédience chiites appelées aussi rebelle Houthis. Avec l’aide de milices pro-iraniennes et épaulées par les militaires restés fidèles à l’ancien président Ali Abdallah Saleh, elles ont mené, début 2014, une offensive armée vers le littoral progressant depuis vers le sud et mobilisant une partie de la population. En septembre 2014, les factions rebelles s’emparèrent de la capitale Sanaa, obligeant, en janvier 2015, le président Hadi a présenté sa démission puis a s’exilé à Riyad trois mois plus tard.
Pour contrer l’offensive chiite et à la demande du président Hadi, l’Arabie Saoudite a décidé d’intervenir militairement au Yémen en mars 2015. Elle mène depuis avec l’aide de neuf pays arabes (Arabie saoudite, Egypte, Jordanie, Soudan, Koweït, Qatar, Oman, Emirats Arabes Unis, Maroc) une coalition militaire aérienne qui pourrait se mouvoir en opération au sol.
Face au vide politique et sécuritaire dans lequel est plongé le Yémen, les réseaux des organisations terroristes opérant sur le territoire se sont renforcés. L’aqpa (branche régionale d’Al Qaida) mais aussi l’Etat Islamique étende leur présence sur le territoire en multipliant les attaques djihadiste.
Avec à l’intervention militaire de la coalition arabe sunnite, le conflit intègre une nouvelle dimension qui marque les tensions entre communauté chiite et sunnite exacerbé par la dualité entre l’Arabie saoudite et l’Iran. La mission onusienne présidée par Ismaïl Ould Cheikh Ahmed tente de trouver une solution politique à l’impasse bien que les perspectives de dialogue ne freinent que peu des combats de plus en plus meurtriers. L’acceptation par les houthistes de la résolution 2216 des Nations unies qui demande aux rebelles de se retirer des zones conquises par la force depuis 2014 ouvre le champ à un début de solution. Une rencontre entre les différentes parties prenantes pourrait avoir lieux fin décembre sous l’égide de l’ONU bien que le lieu et la date de cette rencontre ne soit pas encore acté.
Source : COFACE